Abstract:
En vue de préciser le rang taxonomique de quelques morphotypes de M. polymorpha, M. intertexta, M. ciliaris et M. minima de la région
de Béjaïa, des croisements intra- et/ ou interspécifiques ont été réalisés. Dans le croisement entre M. polymorpha à tache brune à la base des folioles
et M. polymorpha à tache noire au centre des folioles, les hybrides F1 ont montré une forte fertilité pollinique, les deux morphotypes sont donc des
variétés. En F2, il y a eu apparition du phénomène de nanisme (faiblesse hybride) qui, probablement, contribuer à la limitation du flux de gènes entre
ces deux morphotypes. Dans le croisement intraspécifique entre le morphotype M. intertexta sans tache et aux stipules normales et le morphotype M.
intertexta à tache brune et aux stipules foliacées, la fertilité pollinique élevée des F1 et le développement normal des hybrides F2 ont permis
d’interpréter ces deux morphotypes comme deux variétés de la même espèce M. intertexta. Par contre, le croisement entre le morphotype M. minima
aux nervures principales vertes et celui aux nervures principales pourpres n’a donné aucun hybride confirmé. Cela serait dû soit à la technique
d’hybridation non convenable soit à l’existence d’une barrière reproductive entre ces deux morphotypes.
Le déterminisme génétique des caractères étudiés a été analysé. La ségrégation des caractères "tache noire" (dominant) et "tache brune" est de 12:3:1
chez M. polymorpha où l’allèle codant pour le caractère "tache noire" exerce une épistasie dominante sur l’allèle codant pour le caractère "tache
brune". Par contre la ségrégation est de 9:3:3:1 pour les caractères "présence de tache" et "type de stipules" chez M. intertexta.
Dans le croisement interspécifique entre M. intertexta et M. ciliaris, les hybrides ont été confirmés par plusieurs caractères dont le plus important est
le nombre de graines fertiles fortement réduit chez les hybrides F1 en comparaison avec leurs parents (en moyenne 2-3 contre 7-9 graines/gousse
respectivement). La fertilité pollinique faible (35%) démontre que M. intertexta et M. ciliaris méritent le statut de sous-espèces plutôt que d’espèce.
Les taux de fertilité faibles ont été confirmés par l’analyse de la méiose des F1 qui a révélé l’apparition des chromosomes univalents en métaphase I.
La proportion des hybrides 1 dans les cultures en champ (3%) est très significativement inférieure à celle dans les cultures au laboratoire (37%). Les
hybrides F1 entre M. intertexta et M. ciliaris seraient donc moins adaptés que leurs parents aux conditions difficiles. M. intertexta et M. ciliaris
forment deux compartiments d’un même complexe d’espèces entre lesquels le flux de gènes est limité par l’écologie différente des deux taxa, la
faiblesse et la semi-stérilité de leurs hybrides. Dans la nature, les croisements entre les deux taxa sont dus essentiellement à différentes espèces
d’abeilles solitaires et de papillons diurnes.